Dans le cadre d’une démarche Lean, des rituels sont mis en place dans les différents services d’une entreprise afin d’analyser la performance quotidienne et d’identifier les problèmes qui apparaissent.
Une partie des problèmes, les plus simples, peuvent faire l’objet d’une action rapide et immédiate qui est directement prise en compte durant le rituel.
D'autres problèmes, nécessitent de mener une réelle résolution de problème. Cette dernière consiste à analyser les causes des écarts de performance et à identifier les causes racines. Ensuite c’est le traitement de ces causes racines qui permettra de faire en sorte que le problème ne se reproduise plus.
Cet article vous apprend à bien identifier les problèmes, à travers 3 cas pratiques comme méthodes de résolution de problèmes.
L’identification du problème
Avant de lancer toute analyse, il est important d’avoir clairement défini le problème qui est à résoudre.
Cela pourrait sembler à priori une perte de temps, mais il n’est pas rare que face à un même événement, plusieurs personnes aient des idées très différentes sur le problème à résoudre.
Supposons par exemple que notre entreprise produise des boîtes en carton et que nous ayons reçu une réclamation client pour un défaut.
Alors le problème à résoudre peut être de différentes natures :
- Souhaitons-nous faire en sorte que le défaut ne se reproduise plus sur ce modèle de boîtes ?
- Ou que le défaut ne se reproduise plus sur aucun modèle de boîtes que nous fabriquons ?
- Ou encore, notre objectif sera-t-il que, si ce défaut se reproduit, il soit identifié et traité en interne avant que nos produits ne soient livrés au client ?
Découvrez dans cet article comment gérer les réclamations projet dès le départ .
Cela dit, un même événement, mais 3 résolutions de problèmes différentes qui pourraient potentiellement être menées.
Pour commencer à identifier un problème, le meilleur point de départ est la méthode de résolution de problèmes QQOQCCP.
Celle-ci consiste à se poser les questions suivantes, idéalement en groupe de 2 ou 3 personnes :
- Quoi : quel est le problème ?
- Qui : qui est concerné par le problème, qui l’a identifié, qui en est à l’origine, qui connaît bien le sujet ? … l’objectif de ces questions n’étant pas de pointer quelqu’un du doigt, mais d’identifier les personnes dont nous aurons besoin pour mener l’analyse
- Où : où le problème s’est-il produit ? Par exemple sur une ligne de production, mais pas sur une autre
- Quand : quand le problème s’est-il produit ?
- Combien : combien de produits sont concernés ? quel est le coût du problème ?
- Comment : comment le problème est-il apparu ? est-il récurrent ?
- Pourquoi : pourquoi est-ce un problème ? C’est ici l’enjeu de la résolution de problème qu’il s’agit d’identifier.
Cette liste de questions et leurs réponses pourront être ensuite partagées avec le groupe de personnes qui va mener l’analyse et la résolution du problème.
Elles permettront de s’assurer que tout le monde a une compréhension commune des problèmes à traiter.
Les « 5M » ou diagramme de Ishikawa
Rentrons à présent dans l’analyse à proprement parler.
Intéressons-nous tout d’abord à la méthode des 5M.
Cet outil est connu sous plusieurs noms :
- « 5M », du fait qu’il invite à identifier les causes possibles selon 5 catégories dont les intitulés commencent par un M
- « Ishikawa », du nom de son créateur
- « diagramme en arête de poisson », du fait de sa forme
- Ou encore « diagramme causes-effet », puisqu’il cherche à identifier les causes possibles qui ont pu mener à l’apparition d’un effet, en général un problème.
1) Quand et pourquoi utiliser les 5M / diagramme de Ishikawa ?
Le « diagramme 5M » ou « diagramme de Ishikawa » est une méthode de résolution de problème qui s’utilise lorsque l’on n’a pas encore identifié avec certitude les premières causes d’un événement.
Il permet de guider une réflexion de type « brainstorming » afin de lister, de la manière la plus exhaustive possible, toutes les causes potentielles du problème.
2) Comment utiliser les 5M / diagramme de Ishikawa ?
Prenons un exemple de problème à analyser par le prisme des 5M : la qualité d’impression sur l’imprimante est mauvaise.
On commence par représenter une arête de poisson avec 5 branches.
Chacune de ses 5 branches correspond à une catégorie de causes possibles :
- Matière : les caractéristiques ou la qualité de la matière première ou des consommables peut être une cause du problème rencontré
- Machines ou Moyens : les équipements et matériels utilisés
- Main d’œuvre : pour les causes correspondant à un facteur humain
- Méthode : la façon de travailler
- Milieu : il s’agit de causes externes dues à l’environnement (conditions atmosphériques, activités externes, …).
A la droite de cette arête de poisson, nous indiquons le problème rencontré.
Puis une fois affiché cette arête au tableau ou à l’écran, on invite l’ensemble des participants à proposer toutes les causes possibles ayant pu mener à la « mauvaise qualité d’impression ».
Il n’y a pas de censure dans un premier temps : toutes les propositions sont les bienvenues et doivent être notées sur les branches correspondant aux 5 thématiques.
Quand le diagramme nous semble complet, il est alors temps de passer à l’étape suivante.
Rappelons-nous que le « 5M » nous permet de construire une liste d’hypothèses.
Pour pouvoir continuer la démarche d’analyse du problème, il s’agit à présent d’identifier parmi ces causes celle ou celles qui sont certaines.
Ou, à défaut de certitudes, celles qui sont les plus probables.
Plusieurs moyens peuvent nous permettre de mener cette étape de conclusion du diagramme « 5M » et de garder uniquement la ou les causes les plus pertinentes :
- Se baser sur les témoignages des personnes qui ont vu le problème
- Récolter des données, des historiques
- Faire des tests sur le produit défectueux
- Tenter de reproduire le problème.
3) Surmonter les limites de la pensée structurée
S’agissant d’un outil collaboratif de type « brainstorming », il est important de mener une analyse « 5M » en ayant regroupé une équipe pluridisciplinaire avec l’ensemble des expertises utiles pour étudier le sujet concerné.
Dans cette démarche, la créativité et la capacité à penser « out of the box » sont des qualités tout aussi importantes que les connaissances techniques.
Une des critiques formulées à l’encontre de la méthode « 5M » est liée au fait qu’il canaliserait trop la réflexion autour des 5 branches Matière / Moyens / Main d’œuvre / Milieu / Méthodes.
Une manière de contourner cela peut consister à d’abord mener un brainstorming simple sans aucun cadrage, puis lorsque les nouvelles idées s’épuisent, on poursuit avec l’outil « 5M » pour compléter en seconde intention.
L’arbre des causes ou « 5 pourquois »
Une fois identifiées la ou les causes primaires d’un problème, si besoin avec l’aide de l’outil « 5M », nous pouvons à présent utiliser la méthode des « 5 pourquois » ou « arbre des causes » pour poursuivre l’analyse.
1) Quand et pourquoi utiliser l’arbre des causes / les 5 pourquois ?
L’arbre des causes, mené selon le processus des « 5 pourquois », est la méthode principale de résolution de problèmes, qui permet d’identifier la cause racine d’un problème, c’est-à-dire le réel déclencheur qu’il faudra chercher à éliminer.
Il se base sur des éléments factuels, il est donc important de le réaliser avec l’aide des personnes qui étaient présentes au moment de la survenue du problème, ainsi que des experts du domaine concerné.
C’est une méthode d’analyse corrective, c’est-à-dire qu’elle vise à empêcher la reproduction d’un événement qui s’est déjà produit.
2) Comment utiliser l’arbre des causes / les 5 pourquois ?
Pour illustrer l’utilisation de l’arbre des causes, prenons un exemple dans le domaine de la sécurité :
La sécurité se prête particulièrement bien à l’analyse des causes, mais la démarche fonctionne tout aussi bien sur les sujets qualité, maintenance, performance, …
Prenons donc comme exemple : « ma voiture est sortie de la route ».
Nous allons nous poser une première fois la question « pourquoi ? ».
Pourquoi suis-je sorti de la route ?
Cette question peut avoir plusieurs réponses, c’est-à-dire que le problème peut avoir des causes multiples :
- Il pleuvait
- J’étais dans un virage
- Je dépassais la vitesse autorisée
- Mes pneus étaient lisses
Et en général, le lien logique entre ces différentes causes est un « ET ».
C’est-à-dire que pour que ma sortie de route se produise, il a fallu ET qu’il pleuve, ET que je sois dans un virage, ET que je dépasse la vitesse autorisée, ET que mes pneus soient lisses.
Ce qui veut dire que a priori, il suffit de supprimer une seule cause pour que la conséquence (la sortie de route) ne se produise pas.
Comme les causes sont multiples, on les représente sous la forme d’un arbre (à l’envers) avec plusieurs branches.
On parle alors d’un « arbre des causes », méthodologie qui est en fait équivalente aux « 5 pourquois ».
Représentons donc notre début d’arbre suite à ce premier pourquoi :
Imaginons maintenant un instant que nous arrêtions notre analyse à ce niveau.
Que pourrions-nous décider à ce stade ?
Certains éléments semblent hors de notre contrôle et ne ferons vraisemblablement pas l’objet d’actions correctives :
Le fait qu’il pleuve, et le fait qu’il y ait eu un virage sur mon trajet (les puristes pourraient cependant proposer de ne pas circuler par temps pluvieux et/ou de prendre un itinéraire avec moins de virages, mais cela ne semble pas être les solutions à privilégier).
Restent donc deux pistes d’actions :
- Je dépassais la vitesse autorisée
- Mes pneus étaient lisses
Actions auxquelles nous pourrions être tentés de répondre par des actions telles que :
- Suivre un stage de sensibilisation aux dangers de la vitesse
- Remplacer mes pneus.
Mais est-ce vraiment pertinent ?
Notre objectif est, je le rappelle, de mettre en place une ou plusieurs actions correctives permettant de s’assurer que le problème ne se reproduira plus.
Voyons ce qu’il ressort si nous complétons l’arbre des causes réitérant la question « pourquoi ? » plusieurs fois sur les deux branches qui nous semblent pertinentes à analyser :
« Pourquoi je dépassais la vitesse autorisée ? » et « Pourquoi mes pneus étaient lisses ? ».
Ici, dans notre analyse des causes, nous sommes à présent arrivés au niveau du 4ème pourquoi.
Quelles actions correctives nous inspirent les trois causes qui se trouvent au niveau le plus bas ?
- Pour la cause 1 : nous pourrions proposer que je sépare davantage mes rendez-vous dans mon agenda en fonction de la distance à parcourir.
- Pour la cause 2 : je peux décider de planifier dans mon téléphone un rappel tous les mois pour contrôler l’usure de mes pneus.
- Pour la cause 3 : je peux demander à mon cousin qui s’y connait en mécanique, s’il peut faire une révision minimale de ma voiture chaque année.
Vous voyez que ces propositions d’actions n’ont rien à voir avec celles que j’avais proposées après seulement 1 niveau de « pourquoi ? ».
Quelle est la différence entre les actions proposées respectivement au 1er et au 4ème niveau de « pourquoi ? » ?
Au 4ème niveau, en contrôlant mensuellement l’usure de mes pneus pour les remplacer à temps, je suis sûr de ne plus jamais avoir les pneus lisses. C’est une réelle action corrective.
Alors qu’au 1er niveau, en remplaçant les pneus, si je ne les contrôle toujours pas, ils finiront par être lisses à nouveau dans les prochaines années.
Ce n’est pas une action corrective.
Ainsi dans notre recherche de causes il est fondamental d’aller aussi loin que possible dans notre itération des « pourquois ? » afin d’identifier ce que l’on appelle les causes racines, car elles seules pourront engendrer des actions correctives qui empêcheront la reproduction du problème.
3) L'importance de creuser jusqu'aux faits
Contrairement à la méthode des « 5M » vus précédemment, dans un arbre des causes, il ne s’agit pas de faire un brainstorming pour générer des hypothèses sur ce qu’il s’est passé.
L’arbre des causes doit présenter uniquement des faits dont nous sommes certains.
Si nous avons un doute sur un sujet, il faut vérifier en allant sur le terrain, en analysant des données, et/ou en reproduisant l’expérience.
Si l’arbre des causes est mené de manière très rigoureuse, réunissant simultanément toutes les causes (le lien logique « ET ») pour que le problème apparaisse, alors cela signifie qu’il suffit de traiter une seule cause racine pour que le problème n’apparaisse plus.
On choisit en général celle qui peut être traitée par l’action la plus simple et la moins coûteuse.
En pratique on met souvent des actions devant 2 ou 3 des causes racines pour assurer le coup.
Mais dans tous les cas, il n’est absolument pas nécessaire de les traiter toutes.
Le diagramme des affinités
Il peut arriver dans certains cas que les méthodes de résolution de problèmes précédentes ne soient pas totalement adaptés à une situation.
C’est le cas notamment lorsque, malgré nos efforts, nous ne disposons que de peu d’informations sur le déroulement des événements qui ont débouchés sur un problème donné.
Dans ce cas de figure, l’arbre des causes, qui se base forcément sur des faits réels, ne peut pas être exploité correctement.
Pour de tels problèmes complexes et sans réponse évidente, nous pouvons utiliser le « diagramme des affinités », également appelé « méthode KJ », du nom de son inventeur Kawakita Jiro.
Cet outil a plusieurs applications, dont notamment la résolution de problèmes.
Le diagramme des affinités est une méthode créative basée sur le principe du brainstorming.
Chaque participant note sur un post-it chacune de ses idées, en lien avec le thème et avec l’objectif de l’analyse.
Ensuite les idées sont regroupées par catégories, et ce sont ces catégories qui vont être exploitées pour dégager les pistes d’actions.
Dans une résolution de problèmes, le diagramme des affinités s’utilise de manière itérative :
- Il peut être utilisé au départ pour la phase d’identification du problème
ensuite il peut servir de support à la recherche des causes - Puis, il peut permettre de déterminer le plan d’actions à mettre en œuvre face aux causes qui ressortent de l’étape précédente.
Conclusion
Les méthodes de résolution de problèmes peuvent être utilisées quotidiennement dans nos entreprises.
Elles permettent d’analyser des problèmes de toute nature : accidents, réclamations clients, problèmes de maintenance, problèmes de performance, …
Les méthodes en soi sont assez simples à mettre en œuvre.
Il convient avant tout de prendre le temps de mener les analyses correctement, en réunissant les personnes avec les bonnes expertises, et en identifiant les outils les mieux adaptés à chaque étape de la résolution.
Bonjour, SAHA AIDKOM
Merci pour le document partagé.
C’est très clair, il est facile à comprendre par les exemples cités.
Merci.
Avec plaisir !