Le terme "Diagramme PERT" est couramment associé à l'ordonnancement et au contrôle des projets via un diagramme de réseau. Cependant, la méthode PERT désigne en réalité une technique d'estimation à trois points, fréquemment confondue avec le diagramme de réseau.
Nous détaillerons l'application du diagramme de réseau, plébiscité par les planificateurs, à travers un tutoriel, employant l'appellation courante de "diagramme PERT" pour simplifier sa compréhension et son accès.
Pourquoi le diagramme PERT ?
En réalité, l'usage du terme "Diagramme PERT", largement répandu, repose sur un malentendu profond.
L'idée telle que la plupart la conçoivent n'a pas de fondement exact.
Ce que l'on désigne habituellement sous le nom de diagramme PERT est, en fait, une interprétation populaire mais inexacte.
Derrière « le diagramme de PERT », il y a en fait deux concepts : le diagramme de réseau et la méthode PERT.
Souvent, le PERT est simplifié à une méthode de planification des tâches et d'identification des chemins critiques, ce qui ne reflète qu'une partie de sa véritable nature.
La caractéristique distinctive du PERT (Program Evaluation Review Technique) est sa technique d'estimation en trois points, destinée à appréhender l'incertitude avec 50% de chances de réussite, une nuance souvent omise, réduisant ainsi la méthode à une simple visualisation graphique.
Cependant, reconnaissant l'ancrage de cette conception erronée dans l'esprit collectif, nous choisirons de présenter le sujet sous cet angle familier, bien qu'il ne représente pas fidèlement le PERT.
Ce choix est fait dans le but d'engager ceux qui cherchent des informations sur le diagramme PERT, pour ensuite éclairer et rectifier leur compréhension.
Nous vous expliquons d’où vient cette fausse croyance et comment la résoudre.
Qu'est ce que le diagramme de réseau ?
Le diagramme de réseau, confondu avec PERT, se définit comme une méthode consistant à ordonnancer, sous forme de réseau, un ensemble de tâches.
L'interdépendance et la chronologie des tâches contribuent à la réalisation d'un objectif.
Autrement dit, pour traduire la logique d’exécution d’un projet, le diagramme de réseau consiste à représenter sous forme de réseau des étapes reliées par des tâches en exprimant toutes les relations ou contraintes existant entre ces tâches, ce qui nous donne à la fin le diagramme.
Pour planifier son projet, il est important de lister les tâches qui sont en fait les étapes à franchir pour atteindre l’objectif de notre projet et d’ordonnancer ces tâches.
Il est important aussi d’établir les dépendances entre ces tâches.
Dans un projet, le chef de projet ainsi que le planificateur projet collaborent pour identifier et gérer ces dépendances.
Prenons un exemple :
Dans un projet de mise en place d’un nouveau logiciel dans une entreprise, je ne peux pas faire des tests sur le logiciel tant que le logiciel n’a pas été installé sur mon poste de travail.
Donc la tâche “test des utilisateurs” est dépendante de la tâche “installation du logiciel sur le poste des personnes qui doivent faire les tests”.
Parfois, l’exécution de plusieurs tâches est nécessaire pour réaliser une autre tâche précise.
Quel est l'origine de la méthode PERT ?
En 1958, l'U.S. Navy a lancé le projet PERT pour améliorer la planification et l'évaluation des projets de recherche et développement, notamment pour le programme de missiles Polaris.
Initialement nommé 'Program Evaluation Review Task', il a été rebaptisé 'Program Evaluation Review Technique'.
Deux rapports fondamentaux ont été publiés, le second étant accessible via la bibliothèque numérique de l’Université du Minnesota.
Le projet s'est concentré sur deux innovations : le "System Flow Plan", antécédent du diagramme de réseau, et la méthode d'estimation en trois points pour calculer la durée moyenne des activités avec une distribution de probabilité.
Ces travaux, conjointement avec les recherches sur la méthode du chemin critique par Dupont et Remington Rand, ont abouti à l'intégration du PERT comme méthode d'estimation sous incertitude, révolutionnant la gestion de projet.
La gestion de projet moderne, formalisée avec le PMBOK® en 1996, marque un tournant par rapport à l'ère préalable de méthodes ad hoc.
La propagation du "diagramme de PERT" reflète la persistance de croyances mal interprétées mais profondément ancrées.
Cette évolution souligne l'impact des idées partagées sur l'évolution d'une discipline.
Vidéo tutorielle
Vous pouvez également visualiser, dans cette vidéo, la construction de votre diagramme de réseau, depuis le découpage du projet jusqu'à la définition du chemin critique, en passant par l'ordonnancement :
Les règles de notation du diagramme de réseau
Avant de voir comment construire un diagramme de réseau, voyons d'abord les règles de notation à connaitre.
Le "diagramme PERT" représente graphiquement les étapes du projet par des cercles et les tâches pour atteindre ces étapes par des flèches.
Si vous vous souvenez de vos cours de mathématiques, on parlera plutôt de vecteur que de flèche.
Le début de la tâche est donc exprimé par l’extrémité de la flèche à gauche et la fin de la tâche par l’extrémité de la flèche à droite.
Chaque étape, représentée par un cercle, contient une date de commencement au plus tôt et une date au plus tard.
Voici à quoi cela ressemble :
Dans les cas où les projets sont très complexes et impliquent de nombreuses étapes et tâches, les flèches sont remplacées par des traits pour plus de lisibilité avec la norme suivante.
L’étape fin est toujours représentée plus à droite que l’étape début, puisque le temps s’écoule toujours de la gauche du graphique vers la droite.
Certaines tâches peuvent être parallélisées et d’autres sont dépendantes de tâches qui doivent les précéder.
Le schéma ci-dessous illustre bien ceci :
En effet, nous avons dans ce schéma deux étapes E1, E2 et E3. Nous avons aussi trois tâches A, B et C.
La tâche B succède à la tâche A et ne peut être commencée avant que la tâche A soit terminée.
B est donc dépendante de A.
En revanche, la tâche C peut être réalisée en même temps que les tâches A et B, en parallèle.
Une fois les tâches A, B et C réalisées, on arrive à l’étape 3 du projet.
Toutefois, la liaison des tâches et des étapes ne suffit pas toujours pour exprimer toutes les contraintes possibles.
On introduit alors la notion de tâche fictive.
La tâche fictive a pour objet de matérialiser une contrainte.
Elle ne requiert aucun moyen et a une durée nulle.
La tâche fictive est représentée sous la forme d’un trait en tirets pour lequel on a maintenu l’extrémité fléchée qui oriente l’arc de son étape début vers son étape fin.
Ci-dessous, la tâche B succède à la tâche A et la tâche C succède à la tâche A. La tâche B succède à la tâche D. Mais la tâche C ne succède pas à la tâche D.
Le schéma ci-dessous illustre bien les dépendances et la contrainte que je viens d’énoncer :
Remarque : les étapes et les tâches réelles et fictives sont suffisantes pour représenter graphiquement toutes les configurations possibles de planning. Mais ce n’est pas fini, il faut ensuite évaluer les durées de chaque tâche.
Modèle du diagramme de réseau
Téléchargez un template et adaptez le à votre projet.
Télécharger ce modèle de diagramme de réseau
Comment tracer un "diagramme PERT" ?
Pour construire votre "diagramme PERT", il faut estimer la durée de chacune des tâches de votre projet sauf pour les tâches fictives, car comme on l’a vu, la durée des tâches fictives est nulle.
L’unité de temps à utiliser est toujours en durée ouvrée et surtout pas calendaire.
Car seuls les jours où les ressources travaillent doivent être pris en compte, à moins que votre projet soit sensible et stratégique au point de justifier de faire travailler votre équipe projet le week-end.
Voici les 3 grandes étapes à suivre :
1) Créer les dépendances
Commencez par renseigner un tableau pour créer les dépendances entre les tâches, selon un ordre chronologique :
Tâche | Durée | Prédécesseurs | Successeurs |
---|---|---|---|
A | 30 | C | E |
B | 10 | F | G |
C | 20 | D | A, F |
D | 12 | - | C |
E | 60 | A | - |
F | 5 | C | B |
G | 17 | B | - |
- Dans la première colonne, vous allez lister les tâches qui composent votre projet. Dans cet exemple, les tâches ont été nommées de A à G.
- Ensuite, mettez les durées estimées pour chacune de ces tâches. Ici, la tâche A a une durée de 30 jours, la tâche B 10 jours, et ainsi de suite.
- Pour chaque tâche, déterminez les prédécesseurs, autrement dit, les tâches à réaliser obligatoirement avant de démarrer la tâche en question. Ici, la tâche C doit se dérouler avant la tâche A, et ainsi de suite.
- Maintenant que vous avez identifié les prédécesseurs, il faudra en déduire les successeurs. C’est-à-dire, les tâches qui ne peuvent pas démarrer avant la fin de la tâche en question.
Vous aurez compris le principe, ici, la tâche E se déroule donc après la tâche A.
2) Ordonnancer les tâches
Voyons maintenant comment dessiner votre "réseau PERT" :
D’abord placez les étapes "Début" et "Fin".
Puis commencez par les tâches qui n’ont pas de successeurs.
Dans notre exemple, E et G n’ont pas de successeurs, alors on termine le diagramme par ces deux tâches.
Ensuite, posez les tâches qui n’ont pas de prédécesseurs.
Ici, D n’a pas de prédécesseur, donc on commence le diagramme par la tâche D.
Si on reprend notre tableau, la première tâche, D, doit être réalisée en 12 jours.
Vous allez donc renseigner la durée en jours au-dessus du trait de la tâche, soit D12.
De la même façon, nous mettrons les durées des 2 dernières tâches, à savoir :
- la tâche G avec la durée de 17 jours
- et la tâche E avec la durée de 60 jours
Voici ci-après le résultat de ces premières actions :
Voyons à présent comment positionner l’ensemble des tâches restantes.
La tâche D a pour successeur la tâche C, qui elle, doit durer 20 jours.
Ainsi, l’étape 1 contiendra le chiffre 12 jours comme date au plus tôt de la tâche C.
Si nous reprenons notre tableau, nous voyons que la tâche C est suivie par les tâches A et F.
Vous allez donc tirer deux traits distincts à partir de l’étape 2, et mettre les durées respectives pour chaque tâche, à savoir : F5 et A30.
Ainsi, vous voyez naitre deux nouvelles étapes : 3 et 5.
La tâche A ne commence qu’après 32 jours, qui est la somme des durées des tâches D et C, c’est-à-dire 12 + 20.
De même pour la tâche F.
La tâche F a pour successeur la tâche B qui a une durée de 10 jours.
Vous allez donc renseignez B10 sur le trait entre les étapes 3 à 4.
Ainsi, la tâche B peut commencer au plus tôt après 37 jours, qui est la somme de 12 + 20 + 5.
Votre "diagramme PERT" est maintenant presque terminé.
3) Définir le chemin critique
Lors de cette étape, il s’agit de définir le chemin critique qui vous permettra de maitriser les étapes clés et les deadlines.
Par définition, le chemin critique est le chemin le plus long pour accomplir le projet.
Si on reprend notre diagramme, on voit 2 chemins :
- Le 1er chemin D, C, F, B et G, dure 64 jours. C’est la somme des durées de ces tâches.
- Et le 2ème chemin D, C, A, E. Il dure 122 jours.
Le chemin critique est donc le 2ème : D, C, A, E.
La date de fin au plutôt du projet est 122 jours à partir de son démarrage.
Si l’une des tâches de ce chemin prend du retard, votre projet ne sera pas livré à la date planifiée.
Toutes les tâches du chemin critique ont alors une marge nulle.
C’est-à-dire que les dates de démarrage au plus tard et au plus tôt sont identiques.
Sur l’autre chemin non critique, les tâches B et G ne sont pas critiques.
Cela veut dire qu’elles peuvent avoir du retard.
La date au plus tard de G est de 122 – 17, qui est égale à 105.
La date au plus tard de B est de 105 – 10, qui est égale à 95.
Voici ci-après le résultat final :
Conclusion
J’espère que vous avez maintenant une idée plus claire sur le "diagramme PERT", à quoi il sert, et comment l'utiliser dans votre projet.
Et vous, que pensez-vous ?
N’hésitez pas à laisser votre commentaire ci-après.
personnellement, je remercie Claire pour cette belle initiative, qui n’est autre que le degré élever de deux sentiments à savoir : l’amour du prochain et l’esprit de partage avec ses semblables . Vraiment merci du fond du cœur . Cependant, j’avoue que ce cours m’a été d’une utilité indescriptible dans la mesure où il m’a permit de bien comprendre la méthode PERT et surtout son utilité dans la matérialisation des taches critiques dans le diagramme PERT, alors que le diagramme de Gantt, j’ai du mal à identifier les taches critique.
J’ai utilisé le diagramme de Grantt dans une intervention sans le savoir . Merci de me faire découvrir celui de PERT
Merci pour le témoignage 🙂
Pour être honnête avec vous, je préfère le diagramme de GANTT qui a la particularité d’être lisible et clair aux yeux de tous.
Je partage votre avis. Le diagramme de GANTT est beaucoup plus lisible et mieux exploitable.
Il est vrai que de nos jours les gestionnaires des projets se focalisent sur les programmes informatiques qui ressortent des plannings Gantt. Mais je pense que pour une maîtrise des delais il n’y a pas mieux que PERT, le diagramme Gantt est un support de PERT et joue le rôle du calendrier à mon avis
Pourquoi deux taches concurrentes ne peuvent pas être représentées par deux arcs ayant la même origine et la même extrémité. Quelle est la raison de cette règle?
Il est étonnant de constater que bien des chefs de projet continuent de mettre en opposition PERT et Gantt. En réalité, ce sont des outils qui servent à des moments différents du projet : le PERT (ou plus précisément le Criticlal Path Method) en planification initiale, le Gantt en pilotage de l’avancement. Mettre un PERT sur informatique est très compliqué pour rester lisible. Il faut une technique d’animation bien spécifique pour construire un PERT en équipe. Ensuite, la mise sur informatique est (presque) une formalité. J’ai vu des équipes projet fonctionner avec un planning PERT affiché au mur…
Bien des planning ressemblent davantage à des dessins qu’à l’engagement de l’équipe. C’est pourtant la finalité recherchée, non ?
Bonjour Claire,
Et oui, pour notre culture il est bon de comprendre la méthode PERT.
Aujourd’hui je préfère clairement le Gantt fléché, qui est une variante du Gantt et du potentiel-tâches, en termes de représentation.
Cordialement,
JYM
Bonjour Michel, en effet, mais pour notre culture de gestionnaire de projet, il est toujours bon de la connaître et de la comprendre. Concernant Gantt, voici un article sur ce sujet.
Bien à vous,
Claire
Article clair et pédagogique, mais…
Cette méthode (de type potentiel-étape) n’est plus utilisée, aucun éditeur de logiciels ne l’ayant mise en application. Tous ont choisi le réseau potentiel-tâches et le diagramme de Gantt.
Cordialement
Je vous remercie infiniment pour ces précieux cours.